Sexologie
15 octobre 2018 Marie Tapernoux

Tinder, Happn, Grindr : quand seul le sexe est au bout du "match"

Si certains recherchent une belle rencontre, d’autres sont actifs juste pour en profiter sexuellement, sans prise de tête. Pourquoi pas me direz-vous ? Mais il y a un "mais"... La chronique de la sexologue Marie Tapernoux.

Si les applications de rencontres permettent d’élargir les horizons en termes de réseau, elles permettent également de faciliter les "coups d’un soir", sans engagement aucun et en toute liberté. On passe ainsi de "Personne recherche une belle histoire" à "Salut, tu baises ?" sans aucune pudeur ni crainte de refus… 

Il suffit maintenant de s’inscrire en se connectant via Facebook, de se géolocaliser et c’est parti pour un défilé de profils que l’on "zappe" vers la gauche ou que l’on "like" vers la droite. Il n’y a plus qu’à attendre le "match" pour rentrer en contact. Rien de plus simple : les personnes inscrites recherchent toutes une rencontre, que ce soit pour une heure, une nuit ou plus si affinités, et en prime, il ne faut, en principe, pas se déplacer bien loin!

Des nouvelles rencontres facilement

Nombreuses sont les personnes célibataires à exprimer qu’elles ont fait le tour de leurs contacts, qu’elles aimeraient rencontrer d’autres personnes mais ce n’est pas toujours évident d’y arriver seul(e)s. Alors les applications sont LA solution à ce constat : au début, pas besoin de perdre du temps ou de l’argent en invitant à boire un verre ou à manger un bout, pas trop de risque de recevoir un refus ni de voir sa confiance en soi en prendre un coup! On se matche, on se parle (un peu) et on se fixe rendez-vous.

Et ça fait du bien à l’égo : on voit que l’on plaît, qu’il y a plusieurs personnes désireuses d’une rencontre, qu’on a même le choix parmi les "prétendant(e)s".

Enormément de personnes s’y inscrivent suite à une séparation, moment où l’on a le plus besoin d’être rassuré(e), revalorisé(e).

D’autres se sont inscrits après le constat qu’elles ne savent plus trop comment s'y prendre pour rencontrer des personnes nouvelles; d'autres encore font plutôt partie des « bons ami(e)s avec qui on ne veut pas aller plus loin ». A tous ces niveaux, aucun doute, ces applis vous aideront.

Mais si certains recherchent une belle rencontre, d’autres sont actifs juste pour profiter, prendre du bon temps, sans chichis ni prises de tête. Et pourquoi pas me direz-vous ? Où est le mal à se faire du bien tant qu’il y a consentement ? Il est vrai que cela permet des rencontres qui n’auraient peut-être pas eu lieu autrement que par ce biais.

Mais il y a des revers à cette médaille

  • Une consommation aussi facile peut devenir le remède à l’ennui, mais aussi la porte ouverte à une surconsommation, voire à une addiction sexuelle. Au même titre qu’une vision excessive de films pornographiques peut provoquer une addiction, une surconsommation de rencontres sexuelles peut provoquer une réelle dépendance. Cette compulsion sexuelle n’a alors pas de limite et a bien souvent pour but de combler un vide ou de calmer une angoisse. Il devient alors banal de "liker" une personne, de fixer un rendez-vous, de s’envoyer en l’air puis de repartir vaquer à ses occupations, voire se rendre à un autre rendez-vous. Et si ce n’était pas terrible, le/la suivante rattrapera le coup…
  • L’usage excessif de ces moyens de rencontre peut provoquer une incapacité à aborder une personne dans la "vraie vie", le risque étant trop grand de recevoir un refus, ou de devoir investir plus de temps à rassurer l’autre avant que la relation puisse avoir lieu. Il est alors beaucoup plus facile d’envoyer quelques messages, voire quelques photos, avant de fixer un rendez-vous dans les heures qui suivent la prise de contact. Ce qui avait donc pour but de rassurer et de booster la confiance en soi provoque, dans ce cas, tout l’inverse lorsqu’il s’agit d’aborder quelqu’un concrètement.
  • Au fur et à mesure de l’usage de ces applications, une forme de désillusion relationnelle peut se faire ressentir auprès des personnes désireuses d’une vraie relation. A force de recevoir des demandes de légèreté sexuelle, on se blinde, on se protège et on n’ose plus y croire, de peur d’être à nouveau déçu(e).
  • Sans que le lien ne soit clairement et officiellement établi, la hausse des IST (Infections Sexuellement Transmissibles) reste une réelle inquiétude à l’heure actuelle. Or, si l’usage des applications de rencontre servent pour beaucoup à développer leur curiosité sexuelle, ce n’est pas sans risque en ce qui concerne le non-usage des préservatifs (seul moyen pour lutter contre les IST!). Autrement dit, si ces applis permettent des rencontres sexuelles qui n’auraient pas eu lieu autrement, elles provoquent donc une plus grande prise de risque, avec des partenaires dont on ne connaît pas l’histoire ni le parcours sexuel.

Il ne faut évidemment pas tout noircir :

les millions de rencontres de par le monde qui ont lieu grâce à ces applications de rencontre ne se terminent pas toutes par une plainte ou une mésaventure frauduleuse, loin de là !

Et heureusement, on connaît des couples qui se sont connus sur Tinder, Happn, Grinder, Badoo ou autre! Ils sont là pour démontrer que, même s’il est vrai que la nature des rencontres a changé, l’amour peut être partout!

Le tout est donc de rester vigilant, prudent ce qui concerne les informations que vous divulguez, mais également en ce qui concerne le profil des personnes avec qui vous échangez. Et par pitié, protégez-vous : le plaisir n’en sera que plus serein… Conseils d’une sexologue !

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